La certi­fi­ca­tion des quali­fi­ca­tions profes­sion­nelles à l’anglaise

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Créées dans les années 90, les NVQ (National voca­tio­nal quali­fi­ca­tions) et GNVQ (General NVQ) sont des certi­fi­ca­tions natio­nales qui se veulent garantes d’une unicité et d’une certaine trans­pa­rence sur le marché de la forma­tion professionnelle.

Que sont les NVQ ?

Les NVQ corres­pondent à des quali­fi­ca­tions expli­ci­tées en termes de compé­tences par rapport à des situa­tions de travail. Elles visent à établir la capa­cité effec­tive d’un sala­rié (avec la maîtrise des connais­sances et des compé­tences néces­saires) à faire face à une situa­tions de travail. Les NVQ sont établis sur la base de réfé­ren­tiels natio­naux d’activité. 

Ces réfé­ren­tiels, ou stan­dards, font la liste des capa­ci­tés dont font preuve les personnes recon­nues comme compé­tentes dans une situa­tion profes­sion­nelle donnée. Ils prennent en compte tous les aspects comme la connais­sance des meilleurs pratiques, l’adap­ta­bi­lité à de nouvelles situa­tions et le juge­ment qui sous-tend le bon niveau de perfor­mance. Les NVQ n’ont pas à être obte­nus dans un temps donné. Ils peuvent être prépa­rés par des sala­riés ou par des étudiants en stage. aucune contrainte d’âge et de compé­tences préa­lable n’est fixée.

Comment obtient-on les NVQ ?

NVQ sont obte­nus par une évalua­tion et un appren­tis­sage. L’évaluation se fait au travers d’une obser­va­tion en situa­tion et d’un ques­tion­ne­ment. Les candi­dats sont censés appor­tés des preuves de leur compé­tence en rapport avec les réfé­ren­tiels des NVQ. Les évalua­teurs valident les unités lors­qu’ils estiment que les candi­dats sont prêts. Ils procèdent à des tests pour s’as­su­rer que les savoirs la compré­hen­sion et les capa­ci­tés effec­tives induisent effec­ti­ve­ment une capa­cité en situa­tion de travail.

(Cefi.org)

1. Les quali­fi­ca­tions profes­sion­nelles en Grande Bretagne

1.1. La réforme des quali­fi­ca­tions profes­sion­nelles en Grande-Bretagne

En 1986 a été créé en Grande-Bretagne, en vue de réfor­mer le système des quali­fi­ca­tions profes­sion­nelles, le National Council for Vocational Qualifications ou NCVQ (Conseil natio­nal pour les quali­fi­ca­tions professionnelles).

C’est un orga­nisme public sous la tutelle de l’Employment Departement ou ED (Ministère de l’Emploi) et du Department for Education ou DFE (Ministère de l’Education) ainsi que de deux autres minis­tères aux respon­sa­bi­li­tés régio­nales, le Welsh Office (Ministère chargé du pays de Galles) et le Northern Irland Office (Ministère chargé de l’Irlande du Nord). La majo­rité des membres du NCVQ sont des employeurs, mais y sont égale­ment présents des respon­sables syndi­caux et des repré­sen­tants de l’en­sei­gne­ment post-scolaire, supé­rieur et professionnel.

Le NCVQ fut créé à la suite de la publi­ca­tion d’un rapport sur les quali­fi­ca­tions profes­sion­nelles, qui concluait que des mesures urgentes s’im­po­saient pour obtenir ? :

  • un plus grand nombre de personnes mieux quali­fiées dans la main d’œuvre du pays ;
  • des quali­fi­ca­tions basées direc­te­ment sur les niveaux d’ap­ti­tude requis au travail ;
  • un système de quali­fi­ca­tions ration­nel et simpli­fié à l’échelle nationale ;
  • une meilleure qualité et unifor­mité dans l’éva­lua­tion et la validation ;
  • une réduc­tion du fossé entre les quali­fi­ca­tions acadé­miques et professionnelles.

Dans sa réforme du système de quali­fi­ca­tions britan­niques, le NCVQ a cher­ché à faire en sorte que les qualifications :

  • ne fassent pas obstacle à l’ac­cès et à la progres­sion et soient à la dispo­si­tion de tous ceux qui sont capables d’at­teindre les résul­tats néces­saires, quelles que soient les méthodes employées ;
  • encou­ragent l’ap­pren­tis­sage tout au long de la carrière en pous­sant les indi­vi­dus à amélio­rer leurs compé­tences profes­sion­nelles, et recon­naissent toutes les compé­tences et connais­sances acquises durant la vie active ;
  • tiennent compte des futurs besoins en matière de tech­no­lo­gie, de marchés et de sché­mas de l’emploi, et consti­tuent une base saine à la trans­fé­ra­bi­lité entre les divers secteurs d’activité ;
  • améliorent et élar­gissent les débou­chés d’édu­ca­tion profes­sion­nelle pour les jeunes avant leur entrée sur le marché du travail.
1.2. Les National Vocational Qualifications et les normes nationales

Cette réforme s’est traduite par la créa­tion des National Vocational Qualifications (Qualifications profes­sion­nelles natio­nales) qui :

  • sont basées sur des normes de perfor­mance natio­nales, lesquelles sont spéci­fiées indé­pen­dam­ment de la méthode, de la durée ou du lieu d’apprentissage ;
  • mettent l’ac­cent sur les résul­tats plutôt que sur les méthodes d’ap­pren­tis­sage, ce qui reflète la néces­sité de baser ferme­ment les quali­fi­ca­tions sur les besoins de l’emploi.

Les normes de perfor­mances natio­nales sont déri­vées de l’ana­lyse des tâches profes­sion­nelles. Elles doivent être suffi­sam­ment géné­rales pour :

  • permettre une grande souplesse de leur emploi,
  • amélio­rer la possi­bi­lité de trans­fé­rer ses compé­tences dans d’autres contextes,
  • avoir la flexi­bi­lité néces­saire pour répondre aux situa­tions de chan­ge­ment au sein des organisations.

Les normes de chaque NVQ sont présen­tées sous la forme d’une « à décla­ra­tion de compé­tence » répar­tie en plusieurs « à unités ». Les unités consti­tuent les compo­santes des NVQ ; elles sont géné­ra­le­ment spéci­fiées en termes de tâches profes­sion­nelles indé­pen­dantes (distinctes). Dans chaque unité, la descrip­tion détaillées des normes est préci­sée de la manière suivante :

  • les éléments de compé­tence, ou les tâches qu’une personne devrait être capable d’exé­cu­ter au travail ;
  • les critères de perfor­mance, donnant des indi­ca­teurs d’éva­lua­tion de la perfor­mance corres­pon­dant à la norme requise ;
  • la gamme, indi­quant la variété des contextes dans lesquels la compé­tence est appli­quée et le degré de transférabilité.

Le schéma suivant expli­cite les éléments consti­tu­tifs des « à preuves » à recueillir lors du proces­sus d’éva­lua­tion et de vali­da­tion des compé­tences. Cliquez sur l’image pour l’agrandir.

Chaque fois que des acti­vi­tés ou fonc­tions sont communes à plusieurs NVQ, la trans­fé­ra­bi­lité est assu­rée par l’emploi d’uni­tés communes. Pour encou­ra­ger un champ de compé­tence impor­tant plutôt qu’un ensemble de tâches décou­sues, les compé­tences de plani­fi­ca­tion et d’or­ga­ni­sa­tion (gestion des tâches), l’ap­ti­tude à faire face à l’im­prévu (gestion des impré­vus) et l’adap­ta­bi­lité à divers envi­ron­ne­ments de travail et diffé­rents rôles sont incluses dans les normes. De plus en plus, on intro­duit dans les NVQ une gamme d’ap­ti­tudes essen­tielles qui sont présentes dans toutes les acti­vi­tés profes­sion­nelles. Le nom de chaque NVQ indique à la fois le domaine de compé­tence auquel se rapporte la quali­fi­ca­tion et le niveau de la NVQ.

Les diffé­rentes NVQ sont clas­sées selon une grille qui comprend cinq niveaux maxi­mum et qui s’ap­puie sur des critères tels que : l’éten­due des compé­tences, la complexité des compé­tences, le degré de trans­fé­ra­bi­lité des compé­tences dans des contextes ou des envi­ron­ne­ments de travail diffé­rents, la capa­cité d’in­no­ver et de faire face à des situa­tions non routi­nières, la capa­cité de plani­fier et d’or­ga­ni­ser son travail, la capa­cité de super­vi­ser le travail des autres, etc.

1.3. Le rôle des orga­nismes respon­sables et des orga­nismes juges

Pour garan­tir que les quali­fi­ca­tions corres­pondent aux tâches, des orga­nismes appe­lés lead bodies (orga­nismes respon­sables), qui repré­sentent les inté­rêts profes­sion­nels, jouent un rôle crucial dans le déve­lop­pe­ment des NVQ en défi­nis­sant et possé­dant les normes. Il existe envi­ron 150 orga­nismes respon­sables englo­bant tous les prin­ci­paux secteurs d’ac­ti­vité. Chacun d’entre eux est dirigé par des employeurs travaillant en asso­cia­tion avec des repré­sen­tants des orga­nismes syndi­caux et des repré­sen­tants du système d’édu­ca­tion et de forma­tion. Beaucoup des orga­nismes respon­sables ont égale­ment le statut d’Industry Training Organisations (Organisations de forma­tion profes­sion­nelles de l’in­dus­trie), qui formulent l’évo­lu­tion future des besoins en compé­tences et de la forma­tion dans leurs secteurs. Cela renforce l’as­pect pratique de l’ap­proche et encou­rage les employeurs à asso­cier leurs efforts de forma­tion aux NVQ.

Les orga­nismes respon­sables travaillent en asso­cia­tion avec les orga­nismes juges au déve­lop­pe­ment des quali­fi­ca­tions. Le rôle de l’awar­ding body (orga­nisme juge) est de four­nir des systèmes permettant :

  • d’éva­luer les candi­dats par rapport aux normes nationales,
  • d’ef­fec­tuer des contrôles d’as­su­rance de qualité,
  • d’exa­mi­ner et de vali­der les résul­tats des candidats.

Pour garan­tir la trans­pa­rence et un degré élevé d’uni­for­mité dans le fonc­tion­ne­ment des orga­nismes juges, le NCVQ est parvenu à un accord avec les prin­ci­paux orga­nismes juges au niveau de la termi­no­lo­gie, des normes pour les exami­na­teurs et des procé­dures d’as­su­rance de qualité et de contrôle.

Les sept étapes du déve­lop­pe­ment d’une NVQ

1ère étape

Un orga­nisme respon­sable est créé afin de repré­sen­ter un secteur profes­sion­nel. Ses membres comprennent des employeurs, des employés, des orga­nismes profes­sion­nels, etc…

2ème étape

L’organisme respon­sable établit les normes de compé­tence qui consti­tue­ront une NVQ. Une consul­ta­tion a lieu au sein de l’in­dus­trie afin de faire en sorte que les normes propo­sées répondent à ses besoins.

3ème étape

L’organisme juge s’as­so­cie à l’or­ga­nisme respon­sable afin de mettre au point la méthode d’éva­lua­tion des candi­dats et les mesures d’as­su­rance de qualité de manière à ce que les normes propo­sées puissent être déli­vrées sous forme de qualification.

4ème étape

Le NCVQ véri­fie que les quali­fi­ca­tions propo­sées corres­pondent à ses critères.

5ème étape

Un contrat est conclu entre le NCVQ et un orga­nisme juge afin de mettre la NVQ à la dispo­si­tion du public et de l’ajou­ter à la base de données du NCVQ.

6ème étape

Chaque NVQ reçoit une accré­di­ta­tion pour une durée de cinq ans maxi­mum. Durant cette période, les orga­nismes juges sont inspec­tés par le NCVQ afin de véri­fier que le diplôme déli­vré est conforme aux critère de la NVQ.

7ème étape

L’organisme respon­sable réexa­mine les normes et la struc­ture de la NVQ afin de les mettre à jour.

A la fin de la période assi­gnée, les orga­nismes juges soumettent une demande de ré-accré­di­ta­tion pour la NVQ. Le NCVQ passe en revue la perfor­mance de l’or­ga­nisme et, avant de renou­ve­ler son contrat, véri­fie que les normes mises à jour par l’or­ga­nisme respon­sable sont adoptées.

1.4. Evaluation et véri­fi­ca­tion dans le système NVQ

L’évaluation dans le cadre des NVQ doit être solide et fiable afin de faire en sorte que la norme natio­nale puisse être obte­nue au travail. Pour cela, il faut :

  • exami­ner les rensei­gne­ments rassem­blés sur les résul­tats de l’in­di­vidu dans la décla­ra­tion de compétence,
  • en se basant sur une spéci­fi­ca­tion de la forme et de la qualité des résul­tats exigés pour chaque élément de compé­tence conve­nue entre l’or­ga­nisme respon­sable et l’or­ga­nisme juge.

Le contrôle continu revêt une impor­tance toute parti­cu­lière, et les candi­dats se voient donner toutes les occa­sions de prou­ver leur compé­tence. La perfor­mance doit être évaluée dans des condi­tions de travail réalistes, mais les connais­sances et la compré­hen­sion peuvent être contrô­lées sépa­ré­ment. Dans la pratique, une variété de méthodes de contrôle est utili­sée, et l’ex­pé­rience anté­rieure d’un indi­vidu peut égale­ment être prise en compte.

L’évaluation dans le cadre des NVQ a lieu sous les auspices d’assess­ment centers (centres d’éva­lua­tion) approu­vés par l’or­ga­nisme juge corres­pon­dant et se confor­mant au contrôle de qualité externe de cet orga­nisme. Les centres sont géné­ra­le­ment des établis­se­ments d’en­sei­gne­ment, des orga­nismes de forma­tion ou des employeurs faisant appel à des ensei­gnants, des forma­teurs, des super­vi­seurs ou des cadres en tant qu’exa­mi­na­teurs. Pour garan­tir l’uni­for­mité de la qualité, il est demandé aux centres d’opé­rer un système de véri­fi­ca­tion interne, et ils sont eux-mêmes soumis à un contrôle externe par l’or­ga­nisme juge, sous la forme d’ins­pec­tions pério­diques, de prélè­ve­ments d’échan­tillons et d’en­tre­tiens avec les exami­na­teurs et les candidats.

2. Une approche issue d’une culture différente

2.1. Les pays du nord de l’Europe

Les pays du nord de l’Europe conti­nen­tale ont depuis le 19ème siècle élaboré des systèmes natio­naux de quali­fi­ca­tion profes­sion­nelle et de certi­fi­ca­tion fondés, soit sur l’ad­mi­nis­tra­tion centra­li­sée par l’Etat (par exemple en France), soit sur une auto­ré­gu­la­tion ou co-régu­la­tion par les acteurs écono­miques (chambres et asso­cia­tions profes­sion­nelles et syndi­cales dans les pays germa­no­phones et scan­di­naves) [1].

Dans ces pays, la « à quali­fi­ca­tion profes­sion­nelles » est tradi­tion­nel­le­ment défi­nie comme la capa­cité de réali­ser des tâches complexes, multi­di­men­sion­nelles et inter­dé­pen­dantes. Elle s’ap­puie sur l’image tradi­tion­nelles du « à métier » et se réfère donc à la maîtrise de tout un « à champ profes­sion­nel ». les quali­fi­ca­tions profes­sion­nelles, évaluées et certi­fiées à l’aide d’exa­mens théo­riques et pratiques, sont ensuite sanc­tion­nées par des diplômes natio­naux, régio­naux ou locaux, ou encore accor­dés par des orga­ni­sa­tions secto­rielles (par exemples les indus­tries métal­lur­giques ou le secteur bancaire).

Ces quali­fi­ca­tions permettent d’éta­blir des corres­pon­dances, négo­ciées entre les parte­naires sociaux, avec les clas­si­fi­ca­tions des emplois. Les système de ces pays d’Europe conti­nen­tale ont été l’ob­jet de réformes impor­tantes pendant les dernières décen­nies. Des conte­nus plus multi­dis­ci­pli­naires et une place accrue ont été accor­dés aux savoirs et raison­ne­ments théo­riques, visant à mieux armer les jeunes appren­tis face à l’abs­trac­tion, la complexité et l’in­ter­dé­pen­dance crois­sante de la plupart des emplois.

2.2. Les pays anglophones

Les pays anglo­phone, en revanche, n’ont pas d’im­por­tantes tradi­tions de forma­tion profes­sion­nelle forma­li­sée, que ce soit à l’école ou dans l’en­tre­prise. Depuis 1980, certains d’entre eux, comme l’Australie et le Royaume-Uni, ont cher­ché à défi­nir des quali­fi­ca­tions profes­sion­nelles basées sur des « à systèmes unifiés » de quali­fi­ca­tions (les NVQ). Ces systèmes unifiés permettent d’éva­luer et de certi­fier des quali­fi­ca­tions profes­sion­nelles fondées sur la notion de « à compé­tences » défi­nies comme la capa­cité prou­vée d’ac­com­plir des tâches concrètes, préa­la­ble­ment iden­ti­fiées par, ou en coopé­ra­tion avec, les employeurs. La recon­nais­sance de telles compé­tences repose sur des normes, égale­ment élabo­rées avec la parti­ci­pa­tion des employeurs et préci­sant le niveau de diffi­culté et donc de maîtrise exigé.

Contrairement aux tradi­tions des pays de l’Europe conti­nen­tale, ces nouvelles approches essaient d’évi­ter toute réfé­rence aux programmes de forma­tion d’une part, aux clas­si­fi­ca­tions des emplois d’autre part. Elles cherchent à four­nir une mesure neutre (indé­pen­dante des insti­tu­tions et du lieux d’ap­pren­tis­sage), perti­nente et souple des compé­tences, utile aux acteurs du marché du travail et capable d’ajus­te­ment à l’évo­lu­tion des besoins de quali­fi­ca­tion. Elles tendent à décou­per les programmes et les quali­fi­ca­tions en « à modules » et « à unités de valeur ». Au diplôme couron­nant une période pres­crite et prestruc­tu­rée d’ap­pren­tis­sage forma­lisé, se substi­tue la recon­nais­sance de compé­tences plus partielles, accu­mu­lées dans l’ordre et au rythme des oppor­tu­ni­tés rencon­trées par l’in­di­vidu plutôt qu’im­po­sées par le système éducatif.

L’originalité de cette démarche tient à la sépa­ra­tion stricte entre la certi­fi­ca­tion d’une compé­tence d’une part, le lieu et le temps de son acqui­si­tion d’autre part : à l’école ou au travail, en forma­tion initiale ou conti­nue. On « à accré­dite » (constate et certi­fie) un savoir et savoir-faire précis « à acquis quelque part anté­rieu­re­ment ». Cette approche est centrée sur les résul­tats des appren­tis­sages (outputs); elle ne concerne pas direc­te­ment le proces­sus, l’iti­né­raire ou la qualité de l’ap­pren­tis­sage lui-même (inputs).

Cette nouvelle approche, que la plupart des pays anglo­phones déve­loppent actuel­le­ment, a des mérites incon­tes­tables et prou­vés pour les adultes enga­gés dans la forma­tion conti­nue. Dans leur cas, la recon­nais­sance des « à acquis anté­rieurs » a pour but de « à mettre de l’ordre », de clari­fier la diver­sité des expé­riences éduca­tives, profes­sion­nelles, cultu­relles, sociales. Ces acquis peuvent ensuite être pris en compte dans la négo­cia­tion des rému­né­ra­tions et condi­tions d’emploi.

3. Une plura­lité de modes de validation

Le mode de vali­da­tion n’est pas déter­miné en lui-même par les NVQ, plusieurs modes sont possibles : tests, essai pratique, examen tradi­tion­nel, vali­da­tion sur le lieu de travail… Toutefois, le système préco­nise que « à les perfor­mances doivent être mises en œuvre et vali­dées dans des condi­tions aussi proches que possible des situa­tions de travail réelles ? ».

Si des instances de vali­da­tion (awar­ding bodies) sont habi­li­tées à déli­vrer les quali­fi­ca­tions, cela n’empêche pas que tout ou partie de l’éva­lua­tion soit concrè­te­ment effec­tuée par l’en­ca­dre­ment de l’en­tre­prise dans laquelle la personne travaille ou par la personne dési­gnée comme tuteur.

Le système prévoit égale­ment que puissent être vali­dées les compé­tences acquises au cours d’ex­pé­riences profes­sion­nelles anté­rieures (« à accre­di­ta­tion of prior lear­ning »). A cette fin, les candi­dats peuvent four­nir les éléments suscep­tibles d’at­tes­ter leurs compé­tences ; par exemple des disquettes ou des listings infor­ma­tiques résul­tant de leurs travaux pour la certi­fi­ca­tion dans une profes­sion infor­ma­tique, des lettres d’employeurs, des menus, des médailles… pour la certi­fi­ca­tion dans les métiers de la cuisine. Il est en prin­cipe admis que ces éléments peuvent prove­nir d’ex­pé­riences hors de la sphère profes­sion­nelle (par exemple, docu­ment attes­tant que l’on a assuré la tréso­re­rie d’une asso­cia­tion en tant que bénévole).

4. Un levier pour la trans­for­ma­tion du système de forma­tion professionnelle

Dans l’es­prit de ses promo­teurs, un tel système va bien au delà d’une simple mise en ordre des stan­dards en matière de quali­fi­ca­tion. Il est censé produire des effets en profon­deur sur le système de forma­tion lui-même. En parti­cu­lier, cinq objec­tifs sont plus ou moins expli­ci­te­ment visés :

  • Ouvrir l’ac­cès à une quali­fi­ca­tion pour un public d’adultes qui a déve­loppé ses compé­tences à travers l’ex­pé­rience et qui est géné­ra­le­ment exclu des cursus de forma­tion longs offerts aux jeunes.
  • Lutter contre le clivage tradi­tion­nel entre les ensei­gne­ments formels et acadé­miques, géné­ra­le­ment effec­tués dans le système scolaire, et les ensei­gne­ments pratiques effec­tués le plus souvent lors de la forma­tion continue.
  • Lutter contre les formes de sélec­tion par l’échec au sein de l’ap­pa­reil de forma­tion initiale (sélec­tion des « meilleurs » pour la pour­suite de cursus acadé­miques et rejet des moins bons vers des filières dévalorisées).
  • Lutter contre une offre de stages de forma­tion stan­dar­di­sés qui tiennent peu compte des besoins réels des entre­prises et qui se prête mal à une mise en module des formations.
  • Faire en sorte que la vali­da­tion repose le plus systé­ma­ti­que­ment sur les résul­tats de la forma­tion en termes de compé­tences plutôt que sur la vali­da­tion d’un cursus de type scolaire à travers des examens qui attestent plus de l’as­si­mi­la­tion de connais­sances acadé­miques que de savoirs pratiques.

Plus globa­le­ment, l’am­bi­tion du système est de reva­lo­ri­ser les appren­tis­sages en situa­tion de travail, de favo­ri­ser le déve­lop­pe­ment d’or­ga­ni­sa­tions quali­fiantes dans les entre­prises et de remettre en cause la spécia­li­sa­tion fonc­tion­nelle entre les orga­nismes en charge de l’édu­ca­tion et ceux en charge de la forma­tion professionnelle.

L’un des présup­po­sés du système est que l’ac­qui­si­tion de compé­tences profes­sion­nelles faci­lite le déve­lop­pe­ment des apti­tudes géné­rales ou, inver­se­ment, que « à l’édu­ca­tion » ne peut s’ef­fec­tuer en dehors de toute situa­tion concrète d’ap­pren­tis­sage. Même si ce type de présup­posé n’est pas néces­sai­re­ment partagé par tous les acteurs du système, il a marqué sa concep­tion et ses déve­lop­pe­ments récents. Une bonne partie des incom­pré­hen­sion auxquelles se heurte le système dans le reste de l’Europe, et en parti­cu­lier en France, tient à ce qu’on l’ap­pré­hende d’abord comme un système de norma­li­sa­tion des quali­fi­ca­tions alors qu’il est d’abord sous tendu par une concep­tion origi­nale (et qui ne fait pas l’una­ni­mité) des proces­sus d’ap­pren­tis­sage et de déve­lop­pe­ment des compétences.

[1] Danielle Colardyn et Marianne Durand-Drouhin : L’Observateur de l’OCDE n°193, avril-mai 1995.

Fabien Perez